Aujourd’hui, une nouvelle période de confinement nous prive de la possibilité de pratiquer sur les tatamis et de pouvoir découvrir « en vrai » la pratique respiratoire de Maître Tsuda telle que nous l’a transmise Régis Soavi Sensei.
Dans ce moment, il est heureusement possible de lire et de se pencher sur les textes écrits par Itsuo Tsuda qui sont autant de traces, d’indications pour sentir et comprendre le sens (la direction) de ce que nous faisons chaque matin en temps normal au dojo Tenshin.
Dans La science du particulier, au chapitre intitulé « La respiration cosmique », Itsuo Tsuda met en mots la différence qu’il a ressenti entre l’Aïkido tel qu’il a vu Maître Ueshiba le pratiquer et l’Aïkido pratiqué par ses élèves. Puis, il revient sur l’origine de l’expression « pratique respiratoire ».
Voici le passage en question :
En ce qui concerne la première partie de la séance, partie qui précède l’entraînement technique, j’ai connu plusieurs conceptions et, parlant, plusieurs dénominations. Elle était appelée tantôt « exercice préparatoire », tantôt « gymnastique aiki » . Mais le Maître ne lui a jamais donné un nom.
A première vue, toutes les interprétations se ressemblaient plus ou moins et les débutants les acceptaient indistinctement comme une sorte d’échauffement. C’est par un travail continu d’observations et de recoupements que j’ai fini par sentir l’importance que le Maitre accordait à cette pratique.
Lorsque, de temps à autre, le Maitre arrivait en retard pour la séance matinale de six heures et demie, son remplaçant avait déjà terminé cette partie et disait : « nous avons terminé l’exercice préparatoire ».
C’était chaque fois la colère du Maitre qui éclatait en une voix de tonnerre : « Quel exercice préparatoire ? Il n’y a jamais eu une telle chose ».
Et pourtant, lui, il ne lui a jamais donné un nom et l’autre était persuadé qu’il s’agissait bien d’un exercice préparatoire, préliminaire à la technique qui était pour ce dernier la chose principale.
Pourquoi toujours pas de nom ? Difficile à comprendre pour un esprit occidental car pour ce dernier, la.première chose à faire lorsqu’il a quelque chose à préconiser, c’est de lui donner un nom, de lui coller une étiquette. La chose n’existe pas tant qu’elle n’a pas de dénomination.
Faute de mieux, je l’ai baptisée provisoirement de pratique respiratoire, avec derrière toute la résonance que le choix de ce nom puisse susciter.
Il est vrai que dans cette pratique, tout n’est pas dans le même ton. Il existe aussi des exercices qui peuvent passer pour de l’échauffement, comme ceux qu’on applique sur les pieds, les orteils, les voûtes plantaires et les chevilles. Il y en a d’autres qui sont chargés de significations profondes, qui méritent par conséquent quelques explications. Autrement, tous ces gestes deviendraient des frétillements de marionnettes.
Régis Soavi Sensei, dans son introduction à la nouvelle traduction italienne du livre de Itsuo Tsuda la Science du Particulier exprimait tout récemment le bouleversement qu’a été pour lui la lecture de ce chapitre :
Je me rappelle avec émotion du moment où je l’ai lu pour la première fois. J’avais vingt cinq ans et je pratiquais l’aikido depuis longtemps déjà. Le lire fut un choc. En particulier, « les chapitres sur la respiration cosmique » ont bouleversé ma compréhension de l’Aikido. L’enseignement que je recevais encore dans les fédérations, est devenu, dans l’espace de quelques instants, obsolète.
Vous pouvez écouter en podcast, le chapitre intitulé la Respiration cosmique, partie I :